Combattre la précarité et défendre l'emploi
Article paru dans FO Hebdo 3076
→ http://www.fgtafo.fr/
Environ quatre cents délégués ont participé au XIIe congrès de la Fédération générale de l’Agriculture, de l’Alimentation, des Tabacs et des Services annexes FO (FGTA FO), qui s’est tenu du 23 au 26 avril 2013 à Dijon (Côte-d’Or). Ils ont fait le bilan de quatre années d’activité et décidé des orientations de leur fédération pour les quatre années à venir. Rafaël Nedzynski, Secrétaire général de la fédération depuis seize ans, a passé le flambeau. Son successeur, désigné par les suffrages, est Dejan Terglav. Le rapport d’activité a été adopté à l’unanimité moins deux abstentions.
Ils travaillent dans les secteurs de l’agriculture, de l’industrie agroalimentaire, de la grande distribution, du commerce alimentaire, des hôtels-cafés-restaurants, ou encore dans les secteurs des services à la personne ou de la coiffure: quelque quatre cents délégués syndicaux de la Fédération générale des travailleurs de l’Agriculture, de l’Alimentation, des Tabacs et des Activités annexes FO (FGTA FO), réunis en congrès à Dijon sous la présidence de Philippe Pihet, Secrétaire confédéral, ont réaffirmé leur détermination à défendre les droits des salariés, chômeurs et retraités de leurs secteurs professionnels. Le congrès, qui s’est tenu du 23 au 26 avril, a élu un nouveau Secrétaire général, Dejan Terglav, en remplacement de Rafaël Nedzynski, lequel, à 60 ans, avait décidé de passer la main. Dans son rapport oral, le Secrétaire général sortant a constaté que «les premières victimes de la crise sont les salariés. La crise est mondiale, la solution ne peut pas être locale», a-t-il estimé, condamnant les politiques d’austérité menées par les gouvernements en France et en Europe. Rafaël Nedzynski a rappelé l’engagement de sa fédération dans l’action syndicale internationale et européenne. Une action qui permet parfois «une négociation fructueuse». L’Union internationale des travailleurs de l’alimentation (organisation syndicale internationale dont la FGTA est adhérente) a ainsi signé avec Danone un accord sur la santé, la sécurité et les conditions de travail par lequel la multinationale s’engage à mettre en place un suivi médical de tous ses salariés dans le monde.
POUR UNE POLITIQUE SOCIALE AU NIVEAU EUROPÉEN
«Nous revendiquons une politique sociale au niveau européen», a encore souligné Rafaël Nedzynski, en évoquant largement la saignée d’emplois dans la filière viande, due principalement à «la concurrence déloyale entre l’Allemagne et ses voisins». Un dossier abordé par les délégués du secteur, avec celui du scandale de la viande de cheval, dont les salariés font maintenant les frais.
Sur le plan national, Rafaël Nedzynski a rappelé l’opposition de FO à une nouvelle réforme des retraites qui reporterait encore l’âge de départ. Il a condamné l’accord national interprofessionnel (ANI), comme de nombreux délégués, tels Jacky La Soudière (Toupargel) ou Joël Thibaud (Hennessy Cognac). Le Secrétaire général sortant a également insisté sur la nécessité de combattre la précarité. Une préoccupation partagée par Ron Oswald, Secrétaire général de l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation (UITA), qui est intervenu devant le congrès à l’instar d’autres invités internationaux.
L’engagement de la FGTA contre la précarité s’est traduit par la signature d’accords dans différentes branches professionnelles. Ainsi, le secteur de la boulangerie industrielle a inauguré, il y a quatre ans, une série d’accords dans d’autres conventions collectives (coiffure, poissonnerie, charcuterie, services à la personne…) sur l’instauration d’une complémentaire santé. Des accords sur la mise en place d’un treizième mois ont été conclus dans une quinzaine de branches, le dernier en date dans la boulangerie industrielle, comme l’a rappelé Joseph Camus, du groupe Holder Nord. Chez Carrefour, premier employeur privé de France avec 115.000 salariés, un texte a même été signé pour un quatorzième mois. Chez Danone Produits Laitiers, le pouvoir d’achat des salariés a pu être amélioré grâce à l’obtention d’une prime de transport lors des négociations salariales 2012 – une revendication FO: «L’accord permet un versement mensuel dont le montant atteint 194 euros pour plus de 110 kilomètres», s’est félicité Laurent Rescanières, délégué syndical. Une prime que les syndicats FO du secteur laitier veulent étendre à la convention collective.
NON AU TEMPS PARTIEL SUBI
Agir contre la précarité, c’est aussi combattre le développement des temps partiels, qui sont légion dans le commerce alimentaire, dans les hypermarchés, les supermarchés ou les magasins de proximité. La FGTA FO revendique, dans sa résolution adoptée à l’unanimité, «la suppression du temps partiel subi». FO a obtenu chez Carrefour et Casino le relèvement du plancher du temps partiel à 30 heures par semaine et souhaite poursuivre dans cette voie. Par ailleurs, toujours dans la grande distribution, Pascal Saeyvoet (Auchan) a estimé qu’il y avait «urgence à mener une réflexion sur les transformations du travail à l’œuvre», avec l’automatisation des caisses et la «robotisation» des conditions de travail pour la mise en rayon des produits. Nombre de délégués ont souligné la nécessité de défendre le repos dominical des salariés, tel Gérard Covache (Dia). Le représentant syndical s’est aussi inquiété du développement de mise en location-gérance de magasins sous enseigne, qui débouche sur la perte d’acquis pour les salariés, des réductions d’effectifs et sur la généralisation du travail du dimanche.
De nombreux délégués ont fait état de leurs inquiétudes pour l’emploi. Laurent Hobel, de Coop Alsace, une coopérative de distribution créée en 1902, a déploré la disparition prochaine de l’entreprise, en situation de quasi-faillite, qui est passée de 4 200 salariés il y a trois ans à 953 salariés. Cyril Herbin (Coca-Cola Entreprises) a fait état de réorganisations continues depuis plusieurs années et de délocalisations vers des pays à bas coût. Deux plans de sauvegarde de l’emploi sont en cours, qui concernent plus de 200 salariés, alors que le groupe a réalisé 928 millions de dollars de résultats opérationnels en 2012. Pascal Le Cadre, de l’entreprise de découpe et abattage de porcs Jean Floch’ (Morbihan), a évoqué la situation chez Doux, leader européen de la volaille (Père Dodu), placé en redressement judiciaire. «Plus de 1.000 salariés sont sur la touche, a-t-il déploré, fustigeant une direction qui s’est nourrie sur la bête et a laissé mourir l’entreprise.» Jean-Michel Hardi (Marie Brizard) a évoqué un plan social en cours chez Moncigale (filiale vins de l’entreprise), avec 74 emplois sacrifiés. Joëlle Noldin (Carrefour de Sevran) a souligné l’extrême dégradation du marché de l’emploi en Seine-Saint-Denis, un département qui compte «40.000 laissés-pour-compte», surtout des jeunes. Elle s’est néanmoins félicitée d’un accord chez Carrefour qui prévoit le recrutement de 3.000 jeunes en France en 2013, avec un engagement d’embaucher 50% de ces recrues en CDI.
La prévention et la réparation de la pénibilité au travail ont également fait l’objet d’interventions à la tribune. Pierre Agboloto, du groupe Compass (restauration collective), a insisté sur la nécessité d’anticiper les situations de mise en inaptitude, dans un secteur où les salariés sont soumis à des différences de température extrêmes (frigos et préparation des plats chauds). Dominique Douin a lui aussi évoqué les salariés qui sont victimes de pathologies lourdes dans le secteur de la transformation de la viande.
Beaucoup d’autres sujets ont été abordés, comme la syndicalisation ou encore l’égalité professionnelle. Martine Saint-Cricq, du magasin Carrefour Labège (Haute-Garonne), a rappelé que «les femmes subissent le plus les conséquences de la crise». La représentativité a aussi été sur le devant de la scène avec un colloque sur les institutions représentatives du personnel, le 23 avril, en guise de préambule au congrès.
Françoise Lambert
fl@force-ouvriere-hebdo.fr